Il y a quelques jours, je vais faire le plein de ma voiture, accompagné par Poulpinio (mon fils de 7 ans). Tout le long du trajet, il n’arrête pas de me parler du nouveau jeu vidéo qu’il vient d’avoir à Noël, me demandant sans cesse quel était mon personnage préféré…un peu lassé, je ne l’écoute que d’une oreille, jusqu’au moment où, serrant le frein à main, Poulpinio me demande :
« Papa, c’est quoi ton but dans la vie ? »
Un peu surpris, je lui réponds :
« C’est une très bonne question et malheureusement, je ne suis pas certain d’avoir une réponse à te donner »
Ce à quoi il me répond du tac-au-tac :
« Et bien moi mon but dans la vie, c’est de jouer aux jeux vidéo ».
Après avoir rigolé un bon coup, nous sommes sortis de la voiture et avons fait le pleins. Fin de l’histoire ?
Dans un premier temps, j’ai fait le rapprochement entre cette conversation un peu étonnante pour un enfant de 7 ans (qui parle déjà de son « but dans la vie ») et la confirmation récente d’un psy, que Poulpinio vit une poussée tentaculaire (haut potentiel intellectuel dysharmonique pour les connaisseurs). L’histoire devrait s’arrêter là.
Mais en fait non, il y a quelque chose de curieux dans cette histoire. J’ai l’impression que je viens de vivre quelque chose d’important, mais dont le sens m’échappe. Cet échange était trop en relief pour désigner le hasard comme seul responsable.
Figures toi que quelques jours avant que je vive cet échange philosophique, mon esprit s’est donné beaucoup de peine pour trouver (ou définir) quel était « MA MISSION ».
QUEL EST LE BUT, LA RAISON DE MA PRÉSENCE SUR TERRE ?
C’est en fait la grande question qui à fait son apparition dans ma vie il y a déjà bien longtemps et à la laquelle je n’arrive pas à trouver de réponse qui me convienne. Périodiquement, elle refait son apparition, mobilisant mon esprit. Puis elle s’en va comme elle est venue.
Ce coup-ci, j’ai fini par me trouver une mission satisfaisante, qui est de « Apporter ma contribution à ma lignée ». Je m’explique :
Dans ma famille, je suis le premier cas avéré de Poulpitude (HPI pour les non-initiés), Mais il est fort probable que nombre de mes ancêtres l’eussent été avant moi (c’est du subjonctif plus-que-parfait, je viens de l’apprendre 🙂 ) et qu’ils aient vécues comme des vilains petits canards. Alors qu’en fait, c’était des poulpes !!!!
Car être un poulpe, si l’on en croit la littérature actuelle, c’est un héritage. Ce serait une spécificité de construction, une programmation chromosomique, au même titre que la couleur des yeux, la carrure, la couleur de peau et qui se transmettrait de génération en génération. Il est donc probable que mes parents soient des poulpes. Tellement bien camouflés qu’on ne s’en est jamais aperçu. Pareil pour mes frères et sœurs. Après tout, pourquoi serais-je le seul de la fratrie à être doté de ventouses et d’une peau visqueuse…J’ai maintenant la confirmation que mon fils Poulpinio à reçu, en guise d’hérédité, des caractéristiques propres aux céphalopodes. Et pour ma fille Poulpiniotte, elle est encore trop jeune pour dire quoi que ce soit.
Pour faire avancer ma lignée, je souhaite élever mes enfants comme des Poulpes. Qu’ils démarrent leur vie en ayant compris que leur fonctionnement est différent, plus délicat, plus sensible que la moyenne. Et qu’ils n’en sont pas pour autant anormaux. Que le sentiment qu’ils auront peut-être, de nager à contre-courant, de ne pas pouvoir choisir un camp plutôt qu’un autre car ils sont tous 2 critiquables…ça s’explique et ça se gère.
Qu’ils comprennent que cela leur amènera des facilités dans certains domaines, comme la créativité, qu’ils pourront développer et sur lesquelles ils pourront s’appuyer pour réaliser leur vie.
Que cela amènera également des difficultés, comme une frustration extrêmement violente, démesurée qui les poussera à s’exclure ou à s’inhiber pour ne pas souffrir. Mais que quand on comprend cela, on peut apprivoiser sa frustration et bien vivre avec.
Qu’à ceux qui voudront les faire rentrer dans un moule, ils pourront expliquer qu’il existe des personnes de grande taille et d’autres de petite taille. Que ces mêmes grandes personnes sont avantagées au Basketball tandis que celles de petite taille, seront de bien meilleurs jockeys. Et c’est bien comme cela, car il y a de la place pour les basketteurs et les jockeys.
Que si ces obsédés du moule sont capables d’admettre cela, alors ils pourront comprendre que toutes les personnes n’ont pas la même morphologie intellectuelle. Que certains seront naturellement des esprits robustes, fiables et seront avantagés dans les rapports sociaux. En contrepartie ils seront peut-être moins facilement voir les choses dans la globalité et devront faire des efforts pour obtenir cette vision. D’autres auront la capacité d’apprendre plus rapidement mais seront plus sensibles aux méthodes d’apprentissage et parfois moins à l’aise dans les rapports sociaux. Et c’est bien comme cela, car il y a de la place pour tous dans l’école de la République.
Ok, je range mon violon, rangez vos mouchoirs.
Donc tout ça c’est clair, ça a du sens, mais l’épisode de la pompe à essence m’a fait prendre conscience que c’est peut-être incomplet.
Pourquoi ?
Eh bien tout simplement parce que mon Poulpinio est tout sauf un menteur et que s’il me dit que son but dans la vie est de jouer aux jeux vidéo, alors je le crois! Et je ne pense pas me tromper en disant qu’un jour ou l’autre, il va changer de but dans sa vie, il ne va certainement pas rester comme ça indéfiniment.
Il se pourrait donc qu’il y ait non pas « UNE », mais bien « DES » missions. Des missions qui s’enchaînent, les unes derrière les autres, en fonction du moment, du chemin parcouru.
En fait ça me rassure, parce que je dois dire que j’avais la pression pour trouver « LA » mission de ma vie. Imagines qu’elle soit toute pourrie ma mission ou que je la trouve juste avant de mourir 😉 .
Allez, plus sérieusement, voici ma conclusion du moment :
Ma mission, c’est un long voyage dont je connais la destination mais pas le chemin à emprunter. Je commence par me fixer un cap, une direction. Une première étape, qui est sensée me rapprocher de ce que je cherche. Tout en voyageant, j’apprends, je fais des rencontres et je fini par me faire une meilleure idée de l’endroit où je veux aller ainsi que du chemin à emprunter. Parfois, je dois faire demi-tour car je comprends que je n’ai pas pris la bonne direction et qu’il ne faut pas continuer dans cette voie.
Donc, la « grande mission de ma vie » que je cherchais jusqu’à présent n’existe pas, ou plutôt elle existe sous une forme différente de celle que je m’imaginais. Elle vie au travers des différents caps que je me fixe, au grès des rencontres, des expériences, des discussions à la pompe à essence…
Ma Mission, c’est simplement de réaliser ma vie. D’utiliser le « temps terrestre » qui m’a été donnée en d’en faire quelque chose qui donne un sens à mon existence. C’est moi qui choisis.
Je dois juste découvrir ce qui donne du sens à ma vie aujourd’hui et le faire. Demain, ma vie n’aura peut-être plus de sens. La question reviendra d’elle même m’avertir qu’il faut peut-être penser à trouver un nouveau cap. Je ferais alors d’autres choses, qui redonneront à ma vie tout son sens.
Bon, j’ai un peu l’impression d’enfoncer une porte ouverte…dire que j’ai cogité des heures et des heures, depuis des mois, voire des années pour ça ! Mais parfois, ce sont les choses les plus simples que j’ai le plus de mal à comprendre. Heureusement, Poulpinio est là pour m’aider.
Je poursuis ma route et je te souhaite bon voyage !

